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Le week-end à Sète de monsieur bernard à l’occasion de l’exposition Homer Sykes

Sète est-il le nouveau Arles ? Peut-être est-ce encore un peu tôt pour l’affirmer. La programmation artistique n’est sans doute pas aussi pléthorique que celle de la cité camarguaise, les hôtels stylés ne poussent pas comme les champignons à l’automne, et les hordes de parisiens cultivés en congé de fin de semaine n’ont pas encore envahi la ville. Nonobstant, c’est à Sète que vous verrez l’une des meilleures expositions photo de l’année. Car « England : The way we were (1968-1983) », à savoir les oeuvres de jeunesse du britannique Homer Sykes, sont à l’affiche de la MID, alias la Maison de l’Image Documentaire, jusqu’au 31 octobre 2020. Donc, ne tardez pas pour organiser votre week-end à Sète.

Dormons à Sète

Alors au choix, le luxury hostel de Sète se nomme le Georges et c’est forcément un excellent rapport coolitude-qualité-prix, le boutique hôtel de Sète se nomme l’Orque Bleu et il est aussi charmant que ses propriétaires, la chambre d’hôtes de Sète se nomme La Singulière et elle est très jolie et située sur le mont Saint-Clair, et le refuge de luxe se nomme le Domaine Tarbouriech et il de l’autre côté de l’étang de Thau.

Georges Hostel & Café

En plein centre de Sète, le Georges Hostel & Café coche toutes les cases du luxury hostel. Chambre « Big Georges » pour 5 à 140€ la nuit, chambre « Big Fernande » pour 7 à 150€ la nuit, lits en dortoirs à 26€ pour les plus parcimonieux d’entre vous, et petites chambres « What Else » pour 2 à 75€ la nuit, What else, en effet.

L’Orque Bleue

Vous pouvez aussi descendre à L’Orque Bleue, charmant boutique hôtel dont l’un des atouts, et pas des moindres, est de posséder des chambres avec vue, en l’occurence sur le Canal Royal, le mont Saint-Clair et le môle Saint-Louis, autant dire sur les icônes de la ville. Et comme les soeurs Chicheportiche, Laetitia (restauratrice) et Emilie (architecte d’intérieur), à la tête de l’établissement, sont des femmes de goût, elles ont soigné la déco (mobilier seventies et objets design) et elles ont même ouvert une boutique vintage au rez-de-chaussée de l’hôtel. 89€ la chambre double et 160€ la quadruple.

La Singulière

A l’écart du centre de la ville, à l’ombre des pins, sur le mont Saint-Clair, La Singulière est une maison d’hôtes très recommandable pour qui recherche quiétude, bien-être et petit air de vacances. Piscine, spa, sauna, cigales, vue sur la Grande Bleue, rien ne manquera à votre bonheur. Cinq chambres à partir de 125€ la double.

Le Domaine de Tarbouriech

Le moins que l’on puisse dire est que Florent Tarbouriech et sa femme Sabine ont su faire fructifier leur petite entreprise familiale. La ferme ostréicole installée dans les années 60 sur la lagune de Thau est devenue un petit empire. Deux chambres (219€) et deux suites (269€) dans une maison de maître en pleine nature, neufs lodges dans une grange du XIIIè siècle, deux résidences pour artistes, d’adorables maisons de pêcheurs (à partir de 135€, 3 nuits minimum), et un spa abrité dans les cuves du chai de cet ancien domaine viticole. Si votre truc, c’est le luxe de bon goût en pleine nature, le Domaine Tarbouriech est fait pour vous.

Le diner du vendredi soir

Vendredi soir, histoire de vous mettre tout de suite dans l’ambiance, dinez chez Fritto. Au cas où vous aviez un doute sur le menu malgré le nom du restaurant, le slogan inscrit sur la vitrine, « Fritures de ta Mer », ne laisse place à aucune ambiguïté. Donc, Marilou Fassanaro, sétoise pur jus, est passée maître dans l’art de faire frire la pêche locale, mais aussi les légumes du jardin. Fritto misto, forcément, fish & ships, évidemment, sardines en tempura, beignets de mulet, boulettes de poulpe, onion rings, brocolis, courgettes. Un régal. Récompensé par le Fooding 2020 du meilleur lêche-doigts.

Samedi

Les halles

Vous n’êtes pas sans ignorer que le samedi matin de monsieur bernard débute invariablement par un passage au marché. Et à Sète, les Halles valent sans aucun doute la visite. D’ailleurs, si vous avez encore un petit creux post-petit-déjeuner, sustentez-vous donc avec une demi-douzaine d’huitres et ou une tielle de Giulietta (la tourte au poulpe symbole de la ville).

Le Réservoir

Dix petites minutes de marche et vous voici au Réservoir (ouverture des portes à 10h), la galerie-boutique-café-librairie fondée par le collectionneur Gilbert Ganivenq dans un décor industriel de 2000m2 au 45-46 quai de Bosc. Notez d’ores et déjà l’expo Andrew Birkin (le frère) consacrée à Jane et Serge du 6 décembre 2020 au 31 janvier 2021.

Puis redescendez les quais jusqu’au MIAM, le Musée International des Arts Modestes, qui ouvre ses portes à 11h, et qui fête ses 20 ans.

Le MIAM

A l’affiche, outre les collections et les oeuvres de ses fondateurs Hervé Di Rosa et Bernard Belluc, et les commandes réalisées spécialement pour le musée (les sculptures de Théodore et Calixte Dakpogan, la maquette futuriste de Bodys Isek Kingelez, l’hymne du MIAM composé par Pascal Comelade et Général Alcazar, les recettes «modestes» élaborées par les frères Pourcel, la remorque musicale TouTenTub de Jean-Marc Ferrari, les vitrines de Frédéric Magazine…), à l’affiche du MIAM donc jusqu’au 31 janvier 2021, l’exposition « Mondo Dernier Cri !! Une Internationale Serigrafike », rétrospective sur 26 ans d’édition Dernier Cri (plus de 400 livres, 200 estampes en sérigraphies, 5 films d’animation….), le tout augmenté d’un panorama subjectif sur certains acteurs internationaux (ateliers, artistes) croisés par Le Dernier Cri durant toute son aventure éditoriale et sérigraphique.

Les vitrines de Bernard Belluc
Les caravanes d’Hervé Di Rosa

Un peu de shopping avant le déjeuner

Si vous êtes féru de décoration, ce qui est somme toute probable, redescendez les quais, traversez le canal au Pont de la Civette, et allez faire un tour 5 place Delille, siège-showroom-atelier de Designheure, éditeur sétois de luminaires fondé il y a une quinzaine d’années par Bénédicte et Jean-Baptiste Collod et installé dans un magnifique immeuble du XIXè.

A la même adresse, Anne Ferrières a ouvert A Select Store, et a choisi de mettre en avant un artisanat éthique, responsable et contemporain.

Puis reprenez le Pont de la Civette pour vous rendre au Family Store, au 22 rue Alsace-Lorraine. Outre les marques locales La Maison Sétoise et Mini Frenchy, jolie sélection déco, vêtements et accessoires pour toute la famille.

Le déjeuner du Samedi

Deux options pour votre déjeuner. Vous avez pris goût aux tielles, vous allez chez Paradiso ; vous adorez déjeuner dans un marché, vous retournez aux Halles, chez Halles et Manger pour être plus précis.

Paradiso

Alain Cianni n’est rien de moins que le petit-fils d’Adrienne Verducci, reine historique de la tourte au poulpe. Donc, forcément, le jeune homme maitrise l’art de la tielle. Notez que le chausson aux moules vaut également le voyage. A déguster tranquillement assis sur le quai.

Halles et Manger

L’avantage pour un restaurant situé au coeur des Halles, c’est qu’il n’y a pas loin à chercher pour trouver les meilleurs produits frais du jour. Sardines à la plancha, lamelles de seiche au chorizo doux, couteaux en persillade, filet de loup aux agrumes… Magic Mag, la cheffe de Halles et Manger, mitonne une cuisine méditerranéenne dont vous nous direz des nouvelles.

Retraversez le canal pour aller acheter une épuisette, des bottes ou de l’huile marine (selon vos besoins du moment) à la Quincaillerie Marlier, l’une des institutions du port.

Puis sur le même quai, passage à la Galerie Dock Sud que le photographe Martin Bez a ouvert en 2006.

Et vous voici fins prêts pour votre highlight du week-end, l’exposition Homer Sykes à la Maison de l’Image Documentaire.

Homer Sykes à la MID

Homer Sykes – Southend-on-Sea, Essex. 1974. Un couple entre deux âges avec leur Austin Cambridge A50 et leurs propres transats profitent d’un samedi après-midi au soleil.

Homer Sykes est une légende de la photographie britannique. Moins connu en France que son illustre confrère Martin Parr, Homer Sykes fait partie de cette talentueuse génération de photographes britanniques tels que Chris Killip, Graham Smith, Chris Steel Perkins ou encore Tony Ray-Jones ; une génération qui, d’emblée, envisage la photographie en termes de style et fait valoir des choix esthétiques, à mi-chemin entre information et création. « England : The way we were (1968-1983) » retrace les quinze premières années de sa carrière qui furent pour lui une véritable immersion dans le quotidien, le folklore et les mutations d’un Royaume-Uni en crise, dans une société en proie au doute qui se réinvente à travers une culture pop-rock. Attention, le week-end, la Mid est seulement ouverte le samedi de 15h à 18h. Donc ne ratez pas le créneau. Ce serait trop bête, n’est-il pas ?

Homer Sykes – Epsom Downs, Surrey (1970). « Chapeau haut de forme et queue de pie, capuchon en tissu et pipe – c’est le Derby Day. Les Londoniens en congé pour une journée aux courses profitent d’un pique-nique en plein air dans le parking, à l’abri de la brise et au chaud au soleil, ils s’appuient contre une Jaguar. »
Homer Sykes – ThwBalsall Heath, Birmingham (1968). « Une jeune fille irlandaise. Une vingtaine de familles vivaient sur des terrains vagues et vivaient de la vente de ferraille. »
Homer Sykes – Marhamchurch, Cornwall (1970). « La fête du village a lieu chaque année le lundi suivant le 12 août. La reine de la fête est choisie parmi les écolières du village et couronnée par Father Time devant l’église où St. Morwenna aurait fondé son ermitage à la fin du Ve siècle. Dirigée par le groupe local et la Revel Queen nouvellement couronnée, une procession s’est déplacée à travers le village jusqu’au Revel Ground, où la plus jolie compétition de chevilles a eu lieu. »
Homer Sykes – Waterloo, Londres (1975). « Une résidente fière de sa maison lave le pas de sa porte d’entrée et le trottoir, créant une séparation de la crasse quotidienne et de la propreté vertueuse de l’intérieur. Roupell Street a été créée par John Roupell dans les années 1820. Artisans et ouvriers qualifiés occupaient à l’origine cette terrasse géorgienne de cottages du XIXe siècle au cœur de Southwark. C’était l’une des nombreuses rues développées par la famille Roupell qui avait gagné sa fortune grâce à la fonte du plomb et à la ferraille. Les propriétés de leur domaine de Lambeth sont devenues une propriété privée en 1976. »
Homer Sykes – Notting Hill, Londres (1977). « Un couple désemparé ciblé par des jeunes homophobes ; l’homme plus âgé avait été attaqué et son portefeuille volé. »
Homer Sykes – Snowdown, Kent (1976). « Albert Christian et un collègue fumant dans les bains de Pithead. Il y avait deux côtés – le côté propre et le côté sale – et les mineurs avaient un casier dans chacun. Du côté sale, il a accroché ses vêtements de travail Pit Black. Surnommée Dante’s Inferno, Snowdown était la mine la plus profonde et la plus chaude de tout le bassin houiller du Kent ; elle a fermé en 1987. »
Homer Sykes – Chelsea, Londres (1982). « Danser au rythme palpitant de la discothèque du sous-sol de Wedgies sur King’s Road. »
Homer Sykes – Fulham, Londres (1972). « Une famille vient de terminer le petit déjeuner ; ils n’ont pas leur propre salle de bain mais en partagent une dans la maison qu’ils occupent à plusieurs familles. »
Homer Sykes – Gloucestershire (1970). « Lors d’une fête annuelle estivale dans un village, un homme du public vêtu uniquement de son slip tente sa chance sur le ring, mais comme le panneau dit «Quiconque boxe ou lutte le fait à ses risques et périls». »
Homer Sykes – Chelsea, London (1977). « Pendant l’été 1977, les Punks se rassemblaient chaque samedi devant la station de métro de Sloane Square puis descendaient King’s Road en distribuant des fleurs et en bloquant la libre circulation. Il y avait des escarmouches occasionnelles avec des Mods qui se réunissaient dans le coin, et bien sûr la police était là aussi. Il porte un t-shirt déchiré à la mode de chez Smutz. »

Amis de la brocante et du vintage, L’Atelier Watripont n’ouvre le samedi que de 16h à 18h30. Donc à peine sorti de votre expo Homer Sykes, foncez au 40 avenue Victor Hugo chez Thibauld Watripont qui propose une excellente sélection de sièges, tables, luminaires et curiosités.

Le diner du samedi soir

Trois options pour le diner du samedi soir. Vous êtes un fin gourmet et une petite marche sur le mont Saint-Clair ne vous effraie pas, direction La Coquerie. Vous êtes un fin gourmet et vous aimez les institutions locales qui plus est étoilées, direction The Marcel. Vous êtes un fin gourmet mais ce soir vous avez envie d’une bonne pizza, direction Nossa.

La Coquerie

La cheffe étoilée Anne Majourel a passé la main en 2019 à Guilhem Blanc-Brude, aux fourneaux, et à Arnaud Mirabel à la cave, mais rassurez-vous La Coquerie est toujours le haut lieu de la bistronomie sétoise. Grandes baies vitrées donnant sur la Méditerranée, et divines assiettes directement inspirées par les arrivages de la criée voisine. Menu en 6 temps à 65€.

The Marcel

En 1987, Betty Rouzaud et Yves Faurie, deux personnalités incontournables de la vie culturelle de Sète (Betty est la fille de Jean Rouzaud, architecte et peintre, et Yves a développé la galerie d’art moderne la plus renommée de la région), ont transformé un ancien atelier de ferronnerie pour y ouvrir The Marcel. Trente ans plus tard, c’est le chef Fabien Pages, passé par Ducasse, Loiseau et Passard, qui est aux fourneaux de cette institution. Auréolée d’un macaron Michelin, sa cuisine méditerranéenne est un modèle du genre magnifiant poulpes, encornets, loups, et autres rougets. Bon c’est étoilé, donc c’est pas donné. Comptez une centaine d’euros à la carte (menu dégustation à 84€).

Nossa

Laurie Masse et Paulo de Freitas ont quitté la pizzeria parisienne Louie Louie dans laquelle ils officiaient pour s’installer à Sète et ouvrir Nossa. Outre les délicieuses pizzas et les antipasti bien sourcés, la cave vaut également le détour.

Dimanche

Espace Georges Brassens

Si vous aimez Georges Brassens, ce qui serait une preuve supplémentaire de votre ouverture d’esprit et de votre bon goût, commencez votre dimanche par un pèlerinage à l’Espace Brassens (ouverture des portes à 9h).

Filez ensuite vers la Chapelle du Quartier Haut (ouverture à 11h). Ancien couvent des religieuses de Saint-Maur (ou sœurs noires) venues à Sète en 1728 pour s’occuper de l’enseignement de nombreuses filles pauvres du quartier, désacralisée au début du XXe siècle pour devenir l’École Pratique de Commerce et d’Industrie, puis le Collège Technique, la Chapelle du Quartier Haut a été récemment réaménagée pour accueillir des expositions.

Puis direction le Musée Paul Valéry pour déjeuner chez Midi Là-Haut. Nathalie Richin y prépare de délicieuses assiettes méditerranéennes à déguster sur la terrasse ombragée du musée brutaliste.

Puisque vous êtes sur place, il ne vous reste plus qu’à visiter le Musée Paul Valéry. Dans le bâtiment conçu par l’architecte Guy Guillaume au début des années 70 sous une forte inspiration Le Corbusier, belle collection d’œuvres du XIXe siècle à nos jours : classiques, académiques et orientalistes du XIXè (Storck, Cabanel, Carrier-Belleuse, Lefebvre, Sylvestre…), écoles sétoises du XXe siècle (Groupe Montpellier-Sète et Figuration Libre représentée notamment par des œuvres de Robert Combas et de Hervé Di Rosa), mais aussi Marinot, Dufy, Messagier, Sun Wu, Kijno, Pei-Ming…

Et terminer votre week-end par un pèlerinage au cimetière marin de Sète, car même si le grand Georges n’y est finalement pas enterré (faute de place), c’est beau.

Cliquez ici avec votre doigt (ou avec votre souris si vous êtes sur un ordinateur muni de l’ustensile en question) pour accéder à la page consacrée aux adresses de monsieur bernard à Sète.